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- Les jeunes des ghettos en quête de formation
Dans le temps, le ghetto était considéré comme un espace où vit une communauté à l’écart du reste de la population avec des mœurs bien différentes. Avec le poids des années, cette appellation a connu de nombreux glissements de sens. Aujourd’hui, dans la société haïtienne, elle est perçue comme un lieu marqué par les stigmates de la précarité, la contrainte, l’insécurité, la violence et toutes sortes de blessures de l’âme qui s’extériorisent sur l’environnement immédiat. Regardez les graffitis hurlant sur les murs. Les habitants de ces quartiers difficiles sont souvent victimes de stigmatisation et de discrimination. Ils sont généralement pointés du doigt en raison des qualificatifs négatifs qui planent au‑dessus de leur tête. Plusieurs de ces riverains sont repliés sur eux‑mêmes tandis que d’autres particulièrement les jeunes, inquiets pour leur avenir, souhaitent trouver des opportunités pouvant les aider à se démarquer du lot même si le chemin est loin d’être tracé en raison de leur provenance sociale. « Vivre dans un ghetto quand on est jeune n’est pas chose facile, c’est comme subir un châtiment, être dans une prison dans laquelle on ne peut pas évoluer. Certaines fois, on aimerait bien participer à des activités nous permettant de renforcer notre capacité, comme des séances de formation, mais le poids de la stigmatisation et de la discrimination nous guette au quotidien », confie Kerline, une jeune fille de la rue des Remparts, un quartier de Bel‑Air qui surplombe le centre‑ville de Port‑au‑Prince. Originaire de la ville des Cayes, Kerline, 21 ans, habite la zone depuis sa tendre enfance avec son père et sa famille. Depuis environ deux ans, elle a laissé le toit familial pour vivre en concubinage avec le père de son bébé de 9 mois. La jeune femme considère la vie dans un ghetto comme un obstacle pour son avancement surtout sur le plan éducatif. Assise sur une petite chaise en paille, tenant son enfant dans ses bras, l’air inquiet, elle se libère dans un flot de paroles : « Ici, c’est vraiment stressant et dangereux. A cause de la violence qui sévit dans la zone, la vie ne tient qu’à une f icelle. Sous nos yeux, on voit des jeunes, avec un avenir prometteur, se faire assassiner. Je vis avec la peur au ventre. J’aimerais sortir certaines fois, rencontrer des gens d’horizons divers, pouvoir m’épanouir et apprendre de nouvelles choses, mais comment m’y prendre si je n’ai pas les moyens économiques nécessaires sans oublier les tirs qui résonnent au quotidien. Si on arrive à se déplacer, avant de rentrer il faut préalablement téléphoner à quelqu’un pour être au courant des nouvelles. Sinon, on risque d’être victime ». La barrière des stéréotypes N'ayant pas pu continuer ses études secondaires à cause de sa grossesse, Kerline manifeste encore le désir d’enrichir ses connaissances. Aussi souhaite‑t‑elle participer à des séances de formation. Mais hélas, à cause de son origine sociale, l’accès lui est toujours refuser. « Je suis continuellement en quête de formation. Dès que je partage mon adresse avec les organisateurs de ces activités, ils me disent que c’est impossible d’y participer. Ça me fait mal, je qualifie cet acte d’inhumain. Les gens ont toujours cette perception : vivre dans un quartier défavorisé est synonyme de caïd ou être la femme de bandit. On ne devrait pas me coller des étiquettes parce que j’habite une localité. Il existe également des gens bien qui y demeurent et qui aimeraient déloger. Faute de moyens, ils sont encore cloîtrés ici. Je peux compter plusieurs jeunes de mon entourage qui ont décroché de nombreux diplômes. Ces papiers ne les servent à rien présentement en raison des stéréotypes. Sont‑ils des caïds ? Non, ils sont juste au mauvais endroit », se désole t‑elle. Pour Kerline, les jeunes du ghetto sont des laissés‑pour‑compte. Abandonnés à leur triste sort. Personne ne se soucie vraiment d’eux. L’État est aux abonnés absents. Les bons samaritains qui manifestent un brin de volonté pour les aider, bien qu’ils soient minimes, ils ont peur des zones rouges. L’insécurité est une gangrène qui mine tout rapport humain en ce temps où la mort rôde dans la ville. Pour la Bel‑Airienne, leur salut passe par l’éducation. Qui viendra les retirer de cette misère crasseuse ? Esperancia Jean Noel esperanciajeannoel@gmail.com
- L’insécurité : une épée de Damoclès sur les PVVIH de l’Artibonite
Depuis quelque temps, l’actualité tourne autour du département de l’Artibonite. Les attaques armées qui s’intensifient dans ce département font le malheur de tous les habitants. Parmi les victimes de ce drame, on y trouve en grande partie les personnes vivant avec le virus de l’immunodéficience humaine (PVVIH). Sans grande assistance du gouvernement en place, ces patients dépendants de leurs médicaments courent le risque de tomber malade. Préoccupé par cette situation, le coordonnateur des activités à la Fondation Esther Boucicault Stanislas (FEBS), Dr. Joseph Carl Erick OBAS lance un appel urgent pour sauver les objectifs de développement durables : « L’insécurité actuelle affecte très grandement l’accès aux centres de soins aux PVVIH. Plusieurs localités du département sont sous le contrôle de groupes armés ainsi que la route principale. Dans le département de l’Artibonite, nous avons des patients de divers horizons et la plupart d’entre eux sont très vulnérables économiquement. Dépendants de leurs médicaments, ils doivent prendre leur ARV au quotidien. Si pour une raison quelconque il advient une interruption, le risque encouru est de taille : une augmentation du nombre de patients détectables qui tend vers l’augmentation du risque de transmission et l’échec des ODD 2030 », a‑t‑il indiqué. Le médecin généraliste déplore la passivité des autorités sanitaires du pays. A cause de leur silence, la tâche de la FEBS consistant en assistance dans la prise en charge psycho‑sociale et médicale des patients devient plus difficile. Par ailleurs, il se console sur le support de certaines structures internationales. « Du côté du Ministère de la Santé publique et de la Population, il n’existe pas encore de réponse adaptée aux circonstances. À la FEBS, on doit déployer davantage d’efforts pour faire face à cette situation. Les patients ont besoin de nous plus qu’avant. Ainsi devons‑nous remercier l’Université Georgetown, à travers les différents DDP, et la FORSREF, sans leur aide, il nous aurait été difficile de multiplier nos efforts pour accompagner les patients sur le plan médical et psychologique », rappelle Dr OBAS. Cette organisation non gouvernementale, créée le 25 avril 1996, basée à Saint‑Marc dans le bas Artibonite, qui s'occupe de la prise en charge psycho sociale et médicale des clients vivants avec le VIH/SIDA est une oasis au milieu d’un désert. En ces temps difficiles, le coordonnateur craint que la FEBS n’arrive pas à continuer son travail. « Notre mission est d'améliorer la qualité de vie des PVVIH en leur fournissant de l’assistance et toute aide nécessaire pour la réinsertion sociale des PVVIH, leur autonomie financière, l'acceptation et l'estime d'eux‑mêmes pour pouvoir aller de l'avant. Les récentes attaques à Pont Sondé menacent leurs activités. Il y a des cas ou des hommes armés ont saisi des médicaments non pas par besoin mais par méchanceté. D’autre part, les agents chargés de la distribution des médicaments se font kidnapper. L’insécurité complique sérieusement la chaîne d’approvisionnement. Et, ce n’est pas seulement les ARV, mais tout autre médicament essentiel », déplore le médecin. Cette situation demande une réponse urgente. Les objectifs de développement durables à l’horizon 2030, spécialement le numéro 3 : bonne santé et bien‑être, requiert une implication active de l’Etat pour prendre chair. Pour le coordonnateur de la Fondation Esther Boucicault Stanislas, « aucune situation ne doit se dresser sur le chemin vers l’attente de ces objectifs. » Jobenson Andou Jandou08@gmail.com
- Ref‑Haïti met fin au projet Women’s peace and humatarian funds (WPHF)
L’hôtel Montana a accueilli, le mardi 20 août 2024, la clôture du programme « Women’s peace and humatarian funds » (WPHF). La cérémonie s’est déroulée en présence de la Ministre à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes, Mme Marie Françoise Suzan ; la Représentante de l’ONU‑Femmes, Mme Goretti NDUWAYO ; le président du Forum de la Société Civile, Dr Fritz MOISE ; la présidente de l’Alliance, Mme Dorothy SÉNATUS ; la directrice exécutive de l’Organisation de Développement et de lutte contre la Pauvreté (ODELPA), Mme Sœurette POLICAR Montjoie, des leaders d’Organisation de la Société Civile, entre autres. Sous l’égide du Refuge des Femmes d’Haïti, ce projet de 15 mois a eu le soutien financier de l’ONUFEMME. Il s’est articulé autour du thème « Renforçons nos femmes leaders pour lutter contre la VBG » À la cérémonie de clôture, la présidente de Ref‑Haïti, Mme Novia AUGUSTIN a déclaré : « Le programme WPHF consistait à réaliser des activités d’autonomisation, d’éducation aux droits, de développement à l’échelle communautaire. Et également contribuer à l'amélioration des conditions de vie des femmes, des jeunes et toute personne vulnérable tant au niveau social, culturel, intellectuel et financier ». Par ailleurs, elle a indiqué que dans le cadre de ce projet, une séance de formation a été organisée pour 200 leaders sur le VIH, la Violence Basée Genre, la Santé Sexuelle et Reproductive, ainsi que le planning familial. Dans la même veine, la militante en droits de la cause des femmes a souligné que 125 leaders ont été outillés sur la fabrication des produits chimiques et 26 autres dans la fabrication d’objets d’artisanat en macramé. Elle a aussi signalé que 389 femmes et filles déplacées à cause de la violence des gangs ont été recueillies, au cours du projet, dans leur centre d’hébergement à la Croix‑des‑Bouquets. « 35 parmi les femmes hébergées ont reçu un accompagnement financier afin de réaliser une activité génératrice de revenu. On a également réalisé des activités éducatives et de loisirs (camp d’été) avec 40 enfants et adolescents », a‑t‑elle ajouté. « Malgré la panoplie de défis auxquels nous avons faits face au cours de l’exécution de ce programme, nous nous engageons à rechercher de nouvelles sources de financement afin de relancer ce projet. Au nombre de ces défis, je peux vous citer le retard de financement, la sous‑évaluation du budget prévu pour l’accompagnement des femmes dans le centre d’hébergement et l’augmentation du coût des produits, l’insécurité et les troubles socio politiques, et d’autres. Parce qu’en renforçant l’autonomie des femmes et en promouvant l'égalité des genres, nous pouvons mettre fin aux violences faites aux femmes en Haïti », a noté Mme Novia AUGUSTIN. Témoignage des bénéficiaires Du haut de l’estrade, cernés de regards, Carmélie JOSEPH, vêtue d’une robe en pagne africain qu’elle a elle‑même cousue, parle haut et fort dans une salle qui résonne de sa voix. La jeune mère s’estime heureuse d’avoir été parmi les 25 bénéficiaires ayant reçu d’un fond pour démarrer une petite activité génératrice de revenus. « Au cours du mois octobre 2023, j’ai eu la chance de bénéficier de plusieurs séances de formation à Ref‑Haïti, sur les techniques du macramé, j’ai fait de l’infographie et la couture. Avec ce prêt, j’ai pu renforcer mon business de provisions alimentaires et j’ai réussi à faire un peu d’économie », a‑t‑elle dit sur un ton fier. Myrthel HENRY, membre du Rassemblement des « Madan Sara » d’Haïti, RAMSAH, quant à elle, a réalisé pas mal de chose avec son financement. « J’ai pu renforcer mon dépôt de provisions alimentaires. Je vends des bocaux de beurre d’arachides (manba) que j’ai moi même confectionnés et aussi des bouteilles de crémasses ainsi que des cocktails », a‑t‑elle fièrement déclaré. Porte‑parole des femmes bénéficiaires du projet, elle a exprimé sa gratitude envers ONUFEMMES et Ref‑Haïti tout en leur demandant de poursuivre cette l’initiative qui touche de près les femmes dans leur quotidien. Les organisateurs de cet événement ont présenté au grand public les différentes activités exécutées dans le cadre du projet « Women’s peace and humatarian funds ». Ils ont profité de ce moment pour récompenser les 10 femmes les plus excellentes dans la formation sur l’infographie. Ils ont mis en exergue le talent des enfants et des jeunes qui ont participé à leur camp d’été. La journée s’est clôturée avec deux prestations de danses proposées par les enfants et les adolescentes de REF‑Haïti. Marc‑Kerley Fontal marckerleyfontal@gmail.com
- La lutte contre le VIH menacée par l’insécurité en Haïti : Esther Boucicault Stanislas lance un nouveau cri
Haïti fait partie des pays de la caraïbe où la lutte contre le Sida engagée au début des années 2000 a connu le plus de succès. Des figures comme Esther Boucicault Stanislas reste sans aucun doute l’une des plus marquantes de ce combat acharné mené contre la discrimination et la stigmatisation envers les personnes affectées et infectées par le virus responsable de cette maladie. Cette femme a connu un revers sans précédent en décembre 1998 au Rex théâtre alors qu’elle s’apprêtait à prendre la parole pour sensibiliser les jeunes contre le fléau que représentait le Sida durant cette période. Esther Boucicault Stanislas a été chahutée, sifflée, bousculée alors qu’elle était sur la scène de cette salle de spectacle au Champ de mars à Port‑au‑Prince Le début d’une longue guerre En Décembre 1998, Esther a été la première personne infectée par le VIH à dévoiler sa séropositivité au grand public sur une chaine de télévision à visage découvert interviewée par Dr Carlo Désinor. Le risque était énorme mais il le fallait car trop de jeunes et de personnalités commençaient à mourir suite à la contraction du VIH sans pouvoir être soignés. Au début des années 2000, l’Organisation mondiale de la santé a ouvertement fait de la lutte contre le VIH un problème de santé publique. Des conférences organisées dans plusieurs régions du monde pour sensibiliser les Gouvernements autour de la question ont ouvert les yeux des décideurs politiques sur le danger de ce virus immunodéficient. En Haïti, le Fonds mondial de lutte contre le VIH a mobilisé d’importants financements pour soutenir des interventions afin de réduire l’impact du virus dans les communautés La FEBS : un modèle de réussite dans l’Artibonite Les données publiées par le Ministère de la santé publique et de la Population (MSPP) entre 2008 et 2012 montrent que la région de l’Artibonite a été la plus touchée notamment la commune de St Marc. L’installation de la Fondation Esther Boucicault Stanislas (FEBS) a été stratégique pour protéger les jeunes de cette région n’étaient pas suffisamment informés et sensibilisés du danger que représente le VIH. Sous le leadership d’Esther, la FEBS a permis de réduire considérablement le nombre d’infections en assistant les personnes infectées dans la ville de St Marc. En Novembre 2008, une marche nationale a été organisée dans le bas Artibonite. Cette activité a rassemblé des milliers de personnes notamment des activistes venus de plusieurs régions du pays soutenir la lutte d’Esther B. Stanislas pour les PVVIH. Les activités de la FEBS dans la ville de St Marc ont permis de récupérer plusieurs centaines de jeunes garçons et jeunes filles qui faisaient du trottoir. De ces jeunes, plus de 60% ont été infectés par le VIH après avoir bénéficié des tests de dépistage au VIH. Ils ont été immédiatement mis sous ARV pour empêcher d’autres contaminations dans la région. Il a fallu l’intervention de la FEBS pour attirer l’attention des responsables du Ministère de la santé publique et de la Population (MSPP) sur la situation dans le bas Artibonite la plus touchée par le phénomène. Des programmes ont été mis en place pour la distribution de médicaments et une prise en charge plus importante des personnes infectés et affectées notamment les enfants orphelins. Une école de jardin d’enfant et de primaire dirigée par Dr Michèle Maignan a été aménagée à Bois Leta, une section communale de St Marc, en faveur de ses enfants. Une lutte menacée par l’insécurité Ce combat acharné contre le virus du Sida connait un revers considérable depuis les cinq (5) dernières années avec la dégradation de la situation sécuritaire en Haïti. Les PVVIH vivent une nouvelle réalité avec le déplacement de millier de personnes fuyant les violences des gangs armés dans plusieurs régions du pays notamment dans le département de l’Artibonite. Au début de mois de Septembre 2024, plus de 70 personnes ont été assassinées dans la commune de Pont‑Sondé par les gangs armés obligeant plus de 6000 personnes à s’installer dans trois abris provisoires à St Marc selon les chiffres de la protection civile. Cette situation a de sérieuses incidences sur les services offerts aux patients de la FEBS, une institution de santé qui accompagne les personnes infectées depuis environ une vingt ans dans la ville. Selon le spécialiste en santé publique Dr. André Paul Vénor, la situation actuelle d’insécurité et d’instabilité, qui est aussi à la base d’une réduction drastique de financement, constitue un facteur de risque majeur qui peut faire perdre les acquis que le pays a faits dans la lutte contre le VIH. Ce serait très dommage. Il souligne que les partenaires du pays doivent travailler avec les organisations sur le terrain pour éviter la perte des gains durement acquis au cours des décennies passées. Dr Carl Obas, Coordonnateur des activités de la FEBS explique que la continuité dans la prise en charge des patients est importante pour les PVVIH. Il souligne que ces activités contribuent énormément dans leurs récupérations physiques, mentales et sociales. « Nous organisons plusieurs sessions sur divers thèmes dont l’estime de soi, l’entreprenariat, la sensibilisation aux droits humains, nutrition, entre autres. La FEBS organise aussi, par occasion, des sessions de formation sur quelques notions de chimie industrielle comme la confection de savon à vaisselle et détergent pour lave‑vaisselle », a‑t‑il ndiqué. Pour la travailleuse sociale de la FEBS Stéphanie Obas, l'insécurité limite l'accès des PVVIH aux services de santé et rend difficiles les visites à domicile. Les déplacements sont risqués, et cela affecte aussi la régularité des suivis médicaux. Les patients sont souvent dans l'incapacité de se rendre aux centres de santé, ce qui complique leur prise en charge et augmente le risque de décrochage thérapeutique Avec la menace des gangs dans l’Artibonite et compte tenu de la situation f inancière, l’institution qui intervient depuis Avril 1996 pourrait fermer ses portes faute de pouvoir répondre à ses exigences. « Nous faisons face à un grave problème de f inancement. Depuis tantôt 3 ans, nous ne recevons quasiment pas de fonds. Pour cette année, nous sommes en septembre 2024 et nous n’avons encore reçu aucun fond pour la réalisation des activités. Les clients qui vivaient déjà dans une situation difficile sont maintenant aux abois », se désole Dr. Carl Joseph Obas. La Présidente de la Fondation qui porte son nom Esther Boucicaut Stanislas, se dit consciente de la délicatesse de la situation que connait l’institution aujourd‘hui. Toutefois, cette femme courageuse avance qu’elle reste déterminée et veut faire feu de tout bois pour continuer d’accompagner les PVVIH notamment les patients de l’Artibonite. « Certains patients de St Marc ont abandonné leurs maisons pour fuir la violence des bandes armés et se retrouvent à quémander pour se loger. Nous sommes en alerte rouge et nous souhaiterions que les autorités concernées, les bailleurs fassent le nécessaire pour porter assistance à nos clients. Depuis quelques années, les clients sont totalement délaissés », informe Esther Boucicaut Stanislas. Le développement de la situation sécuritaire dans le Pays interpelle sérieusement les membres de la FEBS et ses partenaires sur la nouvelle vie des PVVIH. Des milliers d’entre eux sont dans la nature abandonnant involontairement leur traitement. Pour des centaines qui suivaient assidument leur médication, leur charge virale avait été considérablement réduite et le virus devenait alors indétectable réduisant le risque de sa transmission à une autre personne. Une situation qui pourrait changer si les PVVIH ne trouvent pas d’accès pour continuer leur traitement Haïti a été l’un des territoires de la Caraïbe ayant bénéficié d’importants f inancements dans la lutte contre le Sida, la TB et la Malaria entre 2006 à aujourd’hui avec des progrès considérables dans la lutte contre le VIH. Le taux d’incidence est passé de 6% à 2,1% au cours de cette période. Les traitements mis en place a permis de garder plus de 120 milles personnes en vie Esther Boucicaut Stanislas, cette militante hors‑pair, a mené une lutte sans arrêt pour accompagner ces personnes qui ne pouvaient trouver du travail à cause de leur statut sérologique. Aujourd’hui, elle lance un appel pressant aux partenaires pour conserver ces acquis en évitant de nouvelles infections compte tenu de la situation socioéconomique difficile qui rend la population encore plus vulnérable avec des jeunes filles de 15 à 17 ans qui recommencent à faire du trottoir pour se nourrir aux yeux de tout le monde en pleine rue au cours de la matinée. Eddy Trofort troforteddy@gmail.com
- L’Insécurité : un nouveau grain de sable dans la lutte contre le VIH en Haïti
En Haïti, la vie n’est plus comme avant. Ce n’est plus un constat, mais un fait. Les rues sont méconnaissables. Les hôpitaux, dysfonctionnels. Les écoles et les universités fonctionnent partiellement. Les activités commerciales, réduites considérablement. Des hommes armés font la loi dans la région métropolitaine. Idem dans une partie de la province. Plus de 700 mille personnes ont déjà laissé leur maison pour se réfugier dans des camps. Des milliers de jeunes ont été tués lors des affrontements entre les forces de l’ordre et les bandits armés. Ce sombre tableau, malheureusement, a des répercussions sur la vie de certaines catégories de la population. Les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) sont davantage fragilisées. À cause de l’insécurité galopante, ces patients font parfois un parcours de combattant pour arriver à récupérer leurs médicaments (ARV). Pour continuer leur traitement. Une telle situation oblige les institutions travaillant dans le secteur à sonner l’alarme. Dans un sursaut d’énergie, elles s’arment de courage pour sauver les efforts déjà consentis depuis plus de 20 ans dans cette lutte contre la propagation du VIH. Aujourd’hui, plus d’une dizaine d’organisations de PVVIH à travers le pays attirent l’attention sur l’existence de cette catégorie dans les camps de déplacés. La peur de la discrimination n’est jamais loin dans ces moments de désespoir national. En Haïti, selon les données du Ministère de la santé publique et de la population (MSPP) datant de juillet 2021, 154 000 PVVIH sont concernées par cette situation. Leur exode à travers plusieurs régions du pays constitue un danger et une réelle menace. Imaginez seulement si ces PVVIH, découragées, moralement affaissé, abandonnent leur traitement. Selon ONUSIDA, « La menace du VIH plane toujours sur l’humanité 40 ans après le signalement des premiers cas de sida ». Aujourd’hui, l'engagement de mettre fin au sida à l’horizon 2030 est manifestement en retard. La Rédaction du Newsletter ATTITUDE SANTE du mois d’octobre consacre quelques articles sur la situation des PVVIH dans les camps et le cri d’alarme des institutions travaillant dans le secteur face à ce danger. Bonne lecture ! Eddy Trofort Rédacteur en chef
- Atelier de travail sur le renforcement des capacités des membres du Community-Led Monitoring (CLM)
Les 30 et 31 janvier 2025 se tient un atelier de travail de deux jours axés sur le renforcement des capacités des membres du Community-Led Monitoring, CLM. Cette initiative se réalise dans le cadre des activités de COPPER/CLM /Fond Mondial. Elle vise à outiller les participants sur les meilleures pratiques de suivi communautaire, tout en leur permettant de réviser certaines questions du formulaire d’enquête utilisé par les coordonnateurs et les moniteurs de zone. Dans un contexte marqué par l’insécurité à Port-au-Prince, cet atelier se veut également un espace stratégique pour prioriser les actions de plaidoyer et mieux défendre les droits des populations clés et des groupes vulnérables. Une trentaine de leaders de la société civile prennent part à ces échanges en présentiel et en ligne. Lors de la première journée, Naïke Ledan, activiste globale, a interpellé les participants sur les prochaines opportunités de plaidoyer en vue de la réponse Haïtienne pour cette année. Toutefois, l’annonce récente de cessation et de coupe des fonds PEPFAR vers les pays étrangers dans la lutte contre le VIH/SIDA, suscite de vives inquiétudes parmi les leaders présents. Ces préoccupations portent notamment sur l’avenir des programmes de lutte contre le VIH et le respect des droits des populations clés et des groupes vulnérables en Haïti. Face à ces défis, Naïke Ledan encourage l’émergence d’une nouvelle génération d’activistes capables d’innover et de proposer des alternatives adaptées aux réalités du terrain. Cet atelier marque ainsi une étape clé pour renforcer les capacités des acteurs communautaires dans la collecte des données en intégrant des questions sur le PPR et situation sécuritaire et mouvement des patients pour les orienter vers des plaidoyers en faveur d’une réponse durable et inclusive. Louiny Fontal
- Sélection des bénéficiaires de la Startup dans le cadre du projet ODELPA/ UNHCR
Réunis autour d’une table dans la salle de conférence de l’Organisation de Développement et de Lutte contre la Pauvreté, ce mercredi 13 janvier 2025, un jury composé de trois membres a entamé le processus d’évaluation et de sélection des bénéficiaires de la startup. Il s’agit de Monsieur Dudley SAINT JEAN, représentant du HCR ; Monsieur Garry COQUILLOT, représentant d’ODELPA et Monsieur Robens DOLY, représentant du Forum de la Société Civile à travers le CLM. Cette initiative s’inscrit dans le cadre du projet ODELPA/UNHCR. Après plusieurs heures de travail, ils ont enfin délibéré, 70 participants sur un total de 120 ont été retenu. Ils font partie de ceux qui ont suivi les 4 premières sessions de formations, entre juin et août 2024. Chacun d’entre eux, auront à recevoir une enveloppe de 200 dollars américains dans le but de créer ou renforcer une activité génératrice de revenus. Ce travail constitue une étape cruciale dans le cadre de la campagne d’éducation, de sensibilisation, d’appui psychologique et de renforcement économique des jeunes. Selon le Directeur Technique de ladite institution, M. Louiny FONTAL, cette séance a pour objectif d’évaluer les performances des participants sur la base des critères définis, telles : leur participation, les pré et post-test, le plan d’affaires et le plan de crédit. Selon lui, le jury a été constitué afin de garantir l’impartialité et la transparence dans le processus, encourager l’utilisation de méthodes équitables et standardisées pour l’évaluation. Et enfin, sélectionner les participants les mieux qualifiés pour recevoir le financement. En quoi consiste le travail ? Les participants ont été jugés à partir d’une grille bien détaillée dans laquelle une note a été attribuée à chaque critère, réparti comme suit : participation : 4 points ; post-test : 7 points ; plan d’affaires : 12 points ; plan de crédit : 7 points ; le tout sur un total de 30 points » a confié M. Garry COQUILLOT. Et de poursuivre : « Nous étions stupéfaits parmi ces jeunes, les lauréats ont obtenu 28 comme résultats. Cela sous-entend qu’ils ont pris à cœur toutes les notions apprises avec nous et nous espérons grandement qu’ils les retransmettront à d’autres pour le bien être de leur communauté ». Un résumé du projet Ce programme, réalisé avec l’appui financier du HCR, vise à autonomiser les jeunes pour mieux lutter contre la violence dans leurs communautés. Tout au long de l’année 2024, 180 jeunes, divisés en six groupes, ont pris part à des séances de formations, de quatre jours. Issus des quartiers de Fort National, de Saint Martin et des sites de déplacés de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, ils ont été outillés sur diverses thématiques. On peut citer : la communication sur les réseaux sociaux, les Droits-humains, les Violences Basées sur le Genre (VBG), le VIH/SIDA, la fabrication de produits chimiques, le microcrédit et l’élaboration de plans d’affaires. Quelques Impressions À en croire le Senior Protector Associate à l'UNHCR en Haïti, M. Dudley SAINT JEAN, la séance de travail a été très participative. Il invite les jeunes à saisir cette occasion afin de donner une autre orientation à leur vie et être un modèle alternatif parmi tout les dérives auxquelles nous faisons face. M. COQUILLOT quant à lui s’estime satisfait de ce travail qui constitue une étape importante dans la mise en œuvre du projet. « Personnellement, en me rendant ici, ce matin, j’ai été un peu retissant, sachant l’ampleur d’une telle tâche. Je suis satisfait du travail, que mes collaborateurs et moi, nous avions effectué aujourd’hui et nous souhaitons bonne chance aux gagnants » a-t-il conclu. Il est à souligner qu’une deuxième journée de travail est prévue prochainement afin de choisir les 15 autres jeunes qui clôtureront le top des 85 bénéficiaires. Marc-Kerley FONTAL marckerleyfontal@gmail.com
- Dans le grand périple humanitaire en Haïti, ODELPA apporte son soutien aux femmes battues et exploitées
la situation des haïtiens depuis ces cinq dernières années est qualifiée de " Grand périple " par les organisations non gouvernementales et des organismes des Nations unies. Les gens vivent avec moins de deux dollars par jour. Plus de 4 millions de personnes sont menacées par une crise alimentaire aiguë ; ajoutée à ce sombre tableau, la crise sécuritaire provoquée par la violence des gangs dans plusieurs zones de la région métropolitaine de Port-au-Prince met en jeu notre humanité. Le droit à la vie passe pour un vain mot quand les forces contraignantes de l'État n’arrivent pas à imposer les forces de la Loi. Aujourd'hui, de nombreuses familles fuyant avec leurs enfants, des personnes vulnérables, ou vivant avec un handicap, ne savent où se mettre à l'abri. Pas l'ombre d'une sécurité à l'horizon. Violemment expulsées de leurs foyers, leurs maisons pillées, incendiées, ils sont à terre. Comment arriveront-ils à se relever ? Le bilan de cette tragédie provoquée par l'homme est lourd. Les chiffres publiés par l'Office international pour la migration font état d'environ 600 000 déplacés internes. Dans ces conditions, les structures médicales de Port-au-Prince ne peuvent fonctionner, des femmes enceintes depuis plusieurs mois n'ont pas les moyens ni la possibilité de voir un gynécologue durant les premiers mois de grossesse. L'histoire d'une patiente et bénéficiaire de la journée de consultation organisée à l'occasion de la fête des mères en mai dernier par l'organisation pour le Développement de la population (ODELPA) en son local en dit long. Cette activité réalisée avec l'appui financier du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a permis de comprendre le poids de l'assistance des ONG et des organisations locales sur le terrain à travers un ensemble de programmes visant à renforcer la capacité des petites bourses et des plus vulnérables, notamment les filles et les femmes. Des séminaires de formation, des séances de consultations gratuites, de l'assistance financières pour faciliter des activités génératrices de revenus (AGR) sont les différentes formes de soutien que bénéficient des centaines de jeunes filles et de femmes en quête d'une nouvelle opportunité et une deuxième chance à l 'ODELPA dans ce grand périple humanitaire que traverse le Pays. Dans ce nouveau numéro du Newsletter ATTITUDE SANTÉ, la rédaction vous propose une série de reportages et d'entretiens réalisés avec les bénéficiaires de ces programmes. Des jeunes filles exploitées sexuellement, vivant l'enfer des rues ; des femmes battues, violentées et abusées sont autant de sujets qui constituent le sommaire de cette édition. Eddy Trofort Rédacteur en chef
- Les VBG au cœur de la formationpour les moniteurs et les coordonnateurs
La violence basée sur le genre est en nette expansion en Haïti selon les chiffres révélés par le Ministère de la Condition Féminine et les Droits de la Femme et ses partenaires. Entre janvier et mars 2024, sur un échantillon de 1793 cas de violences analysés, dans six départements géographiques du pays, 80% de femmes et 14% de jeunes filles ont été les principales victimes de cette forme de violence. Ce qui explique l'augmentation considérable des cas de viol et la justification de la vulnérabilité de la femme au sein de la société alimentée également par la situation sécuritaire dégradante que connait le pays depuis ces cinq (5) dernières années. Dans le but de combattre les VBG, le paludisme et la malaria, l'Observatoire Communautaire des Services VIH (OCSEVIH) a réalisé un atelier de formation au profit de 14 coordonnateurs et de 28 moniteurs de zone. Ces séances se sont déroulées du 11 au 14 juin 2024, au local de l'Organisation de Développent et de lutte contre la Pauvreté (ODELPA) à Delmas. Au cours de ces quatre journées, les membres de cette nouvelle équipe de terrain ont été outillés sur ces pathologies endémiques dans le pays, les droits humains, les présentations des techniques de plaidoyer, les bonnes pratiques du CLM, entre autres. Au cours de l'entrainement sur les outils papier, la deputy director de Housing Works, madame Leinadine Lucien Maurice a mis l'accent sur les différentes formes de violences, notamment le harcèlement sexuel. Elle a fait savoir qu'" en Haïti, les jeunes filles ont souvent tendance à fuir les groupes d'hommes réunis dans un endroit spécifique. Les commentaires lancés à leurs égards sont dérangeants ". Dans cette session de formation, elle a attiré l'attention sur la dure réalité que représente la violence sexiste à laquelle les jeunes filles et les femmes sont confrontées. Un aveu inattendu Comme pour donner raison à l'animatrice de la formation, Myriame, une femme dans la trentaine raconte son périple au quotidien. Elle est victime de violence conjugale. " J'avais un compagnon qui contrôlait toutes mes dépenses, même mes rémunérations mensuelles. Dès que je rentrais avec mon chèque de travail, il s'en accaparait ", a-t-elle commencé. Tous les yeux se sont tournés vers elle. " Par amour pour sa personne, je ne comprenais même pas que j'étais victime de violences. Plus le temps passait, plus forte était son emprise. Un jour, en discutant avec certaines amies de ma situation conjugale, surprises de mon train de vie, ces dernières m'ont conseillé d'ouvrir un compte bancaire. Et c'est là qu'a commencé mon calvaire ", a-t-elle raconté. À haute voix, Myriame raconte : " Mon conjoint estimait que c'était un manque de respect à son égard. Il était vraiment mécontent et furieux. C'est en approchant les organisations de femmes que j'ai compris la gravité de ma situation. “ Réactions des participants Suite aux regards sympathiques de certains membres de l'assistance et des propos d'indignation prononcés, Mme MAURICE a eu une prompte réaction : " Je vous conseille de rester impartial lors des visites de terrain. Quand vous aurez à questionner les patients, assurez-vous de maitriser vos réactions (gestes, regards et paroles). Parce que cela peut faire du mal à la victime, sans vous rendre compte. " Les moniteurs et coordonnateurs qui ont pris part à cette formation croient qu'une attention soutenue devrait être portée sur la qualité de formation liée à ces thématiques sensibles. À l'issu de cette session de formation ces derniers ont été déployés dans les dix départements du pays afin de monitorer les centres de prise en charge des patients tuberculeux et paludiques ainsi que les victimes de VBG. Marc-Kerley Fontal marckerleyfontal@gmail.com
- Anna, l'espoir caché à l'ombre d'une vie périlleuse
Âgée de 15 ans, Anna, une adolescente réside à Delmas 19. Elle a été accueillie par Mirlène alors qu'elle connaissait de sombres moments de sa vie. Les calvaires d'Anna ont commencé lorsqu'elle a su qu'elle était enceinte. Le monde s'est écroulé autour de cette adolescente qui n'a jamais connu son père. De son enfance, après la mort de sa mère, elle était obligée de s'installer chez une tante. Là, elle a connu toutes les misères et la maltraitance. Elle écroulait sous le poids des tâches domestiques. Et le jour où sa tante n'avait plus besoin de ses services, elle sera chassée. Aujourd'hui, Anna mène tous les combats pour éviter à ses enfants de vivre les misères qu'elle a connues. Anna vagabondait dans les rues de Port-au-Prince convaincue que sa tante ne voulait plus la reprendre. Elle a passé plus d'un an à dormir sur les trottoirs, dans les marchés et les camionnettes. Pour se nourrir, elle a vécu à la merci des gens qui lui jetaient des miettes de pain, et certaines fois, elle demandait l'aumône. C'est là qu'elle a fait la connaissance de la benjamine de Mirlène, elles se sont tout de suite liées d'amitié. Ce qui a changé le courant de sa vie. Après quelques semaines chez Mirlène, Anna a croisé le chemin de Richard, un jeune homme qui lui a déclaré sa flamme. Leur différence d'âge ne l'a pas empêché de tomber également sous charme de ce jeune homme. Et cela n'a pas pris de temps pour qu'ils entretiennent une relation amoureuse. À la genèse de cette histoire, tout semblait aller comme sur des roulettes. Anna a confié avoir ressenti un bonheur extrême dans son être. " Je l'aimais profondément et je pensais que c'était réciproque ". Dans le souci de lui prouver le degré de son amour, Anna a cédé au désir de franchir une autre étape. Elle a copulé avec son amant sur un coup de tête, sans même penser de se protéger contre les ISTet encore moins contre une grossesse. Une histoire partie en fumée " Lorsque j'ai confirmé que j'attendais un bébé, j'ai immédiatement vu Richard pour lui en parler. Apparemment, cette nouvelle ne semblait pas le réjouir. Il m'a seulement dit qu'il va en parler à sa mère, puisqu'il ne travaille pas et qu'il est encore sous sa responsabilité ", a expliqué Anna en baissant la tête. Et sa misère ne faisait que commencer. Dans les yeux d'Anna, on peut lire tristesse, peur, regrets et chagrin. " Sa mère, en apprenant la nouvelle, m'a demandé de mettre fin à ma grossesse. Cette dernière estime que je ne corresponds pas au profil de son fils. Elle m'a clairement dit que je le veuille ou non, cet enfant ne verra pas le jour. Pour un aïtien, décoder un tel message n'est pas difficile. Dès lors, Richard ne m'a jamais accordé le moindre regard, encore moins m'adresser la parole ", ajoute- t-elle. Leur flamme n'a duré que trois mois. Contente de sa décision de garder le bébé, Mirlène, qui a déjà six enfants, remue ciel et terre pour accompagner la future mère au cours de cette épreuve. Avec un petit commerce de bonbons et d'autres sucreries qu'elle vend dans une école située dans une rue de Port-au- Prince, Mirlène prend en charge Anna. Première consultation médicale Si pour une femme enceinte, il est obligatoirement recommandé qu'elle soit consultée dès les premières semaines de sa grossesse, pour Anna le tableau était bien différent. " J'ai cinq mois de grossesse et je n'avais jamais vu un médecin jusqu'à aujourd'hui ", a chuchoté Anna au médecin qui l'examinait à la foire médicale réalisée par l'Organisation de Lutte et de Développement contre la Pauvreté (ODELPA), en mai 2024. À l'activité annuelle de l'ODELPA à l'occasion de la fête des mères, Anna n'est pas passée inaperçue. Vêtue d'une robe bleue, coiffée de deux tresses, elle était accompagnée de Mirlène. Assise sur une chaise à ses côtés, les réprimandes de sa tutrice variait de temps à autre " Arrête de mettre ta main dans ta bouche " ; " Laisse ta robe tranquille " ; " Arrête de défeuiller les arbres ". Mais Anna se fatiguait d'attendre son tour. " En tant que médecin son cas m'intrigue. Elle va mettre au monde son premier né, je suis la première à la voir sur 5 mois, son cas est très complexe ", a déclaré Dr Jasmine JEAN LOUIS, gynécologue. Par respect pour le serment d'Hippocrate, elle ne pouvait nous dire plus sur le dossier de sa patiente. " Désolée, je ne peux pas vous en dire plus ", a-t-elle ajouté. Depuis ce jour, Anna a le support de l'ODELPA pour les suivis médicaux jusqu'au terme de sa grossesse. " Je tiens vraiment à remercier L'ODELPA pour son accompagnement. Au cours de mes premiers mois de grossesse, Mirlène n'avait pas les moyens pour m'emmener à l'hôpital. Mais désormais, j'y vais régulièrement, je connais l'état de ma santé et celui du bébé. J'en suis vraiment reconnaissante de cela. J'attends impatiemment la naissance de ma fille, j'espère qu'elle sera mon portrait craché ", conclut-elle arborant un large sourire. Esperance d'avenir Anna caresse l'idée de retourner à l'école afin de boucler ses études classiques. C'est un moyen qui lui permettrait d'avoir une vie meilleure pour le bien de son enfant. " Après mon accouchement, je laisserai le bébé sous la charge de Mirlène dans l'objectif de poursuivre avec mes études. Je veux éviter que mon enfant connaisse le même sort que moi. J'espère lui donner tous les moyens qu'elle aura besoin dans ma vie. Je suis prête à me battre afin qu'il devienne quelqu'un d'utile et d'important dans la société ". *Anna, Mirlène, Richard, sont des noms d'emprunts. Marc-Kerley Fontal marckerleyfontal@gmail.com
- Violence en Haïti, un fléau qui se normalise
Naama Jose Joseph Jean, 33 ans, mère de deux enfants. Mariée depuis huit ans, séparée de son époux, elle est l'exemple incarnée de résilience et de force. Après avoir surmonté diverses difficultés, l'originaire de Port-au-Prince ne manque pas de courage pour garder le cap vers ses objectifs. Diplômée en hôtellerie et tourisme, Naama travaille souvent dans des hôtels, des restaurants ou des clubs. Par moment, elle doit terminer très tard son travail. Alors que l'insécurité prend un peu plus d'espace avec le temps, Naama, comme beaucoup d'autres femmes en Haïti, a été victime de ce phénomène qui menace la vie dans nos villes. Parmi les différents types de violences, elle en a connu plusieurs : autant dans les rues de la capitale que dans son foyer censé être son havre de paix. " Je me souviens, en rentrant de mon travail, au carrefour de Delmas 60, deux hommes armés à moto m'ont agressé. Il était 11 heures du soir, je devais coûte que coûte aller à Delmas 18 où se trouve ma résidence. Les rues étaient vidées et vu l'heure je ne pouvais compter sur un ''tap tap'' pour descendre. J'ai donc pris la route mais avec une peur bleue et je réfléchissais à plein de choses ", se souvient-elle. Anna venait de recevoir son salaire et l'argent de son loyer. Quand elle entendit une moto se rapprocher, elle avait une boule au ventre, confia-t-elle. Finalement la moto s'était arrêtée. “ Deux hommes sont arrivés et m'ont demandé de leur donner tout ce que j'ai. Je n'ai pas obéi. Ils ont descendu la moto pour ensuite me tabasser et partir avec tout ce que j'avais. Inutile de vous dire comment j'ai vécu ce moment de ma vie. Perdre mon salaire, l'argent de mon loyer, mon téléphone et mes documents ont été suivis de lourds fardeaux ", raconte la jeune dame. Pour se remettre de ces agressions, Naama a dû s'appuyer sur la médecine traditionnelle pour se refaire. Entre douleurs physiques, chocs émotionnels et les soucis sociaux, Naama s'est résolue d'avancer. Elle explique comment elle a fait pour joindre les deux bouts au cœur de tout ce chaos : " J'ai dû quitter le travail après ce malheureux incident. Pour le moment, je fais du commerce. Je vends des boissons gazeuses, je prépare du beurre d'arachide, je vends des sandales, des vêtements neufs etc... Ce n'est pas facile avec mes deux enfants, car je suis seule à pourvoir à leurs besoins ", raconte c e t t e f e m m e c o u r a g e u s e . Naama était de ceux qui ont pris part à la formation offerte par l'Organisation de développement et de lutte contre la pauvreté (ODELPA). " Cette formation, m'a aidé à comprendre beaucoup de choses. Ce fut aussi une piqure de rappel sur celles que je négligeais. J'ai appris à gérer mon entreprise de manière différente ; à maitriser mes émotions etc.. La chose la plus importante que j'ai apprise c'est autour de la violence. Mon mari avait la mauvaise habitude de porter la main sur moi et c'est à l'ODELPAque j'ai découvert que c'est anormal. " Les problèmes de Naama ne se sont pas envolés mais elle sait à présent comment mieux s'y prendre. Cette jeune dame qui rêve d'ouvrir un grand restaurant avec un magasin peine par manque de ressources économiques. Toutefois, elle continue de bien mener ses affaires dans l'espoir d'y parvenir un jour. Jobenson Andou
- Réduire la violence par la formation des jeunes, la grande affaire de l'ODELPA
Depuis plusieurs années, l'Organisation de Développement et de\ Lutte contre la Pauvreté (ODELPA) s'est donnée pour mission de lutter contre la violence, ce fléau qui ronge la société haïtienne. Avec la prolifération des groupes armés, la majorité des jeunes y sont exposés particulièrement ceux des quartiers vulnérables. Pour pallier ce problème, les responsables de cette institution croient fermement que l'arme la plus puissante qui doit être utilisée n'est autre que la formation. Acet effet, plusieurs séances ont été réalisées afin d'atteindre cet objectif visé. " Nous avons organisé plusieurs activités au profit des jeunes. Ces dernières années, nous avons mis un accent pointu sur ceux provenant des quartiers vulnérables. Pour démarrer avec ces séries de formation, nous avons eu une première session avec le support financier du programme commun des Nations Unies sur le VIH/SIDA(ONUSIDA). Lors de la remise des certificats de cette première cohorte, le chargé de liaison du Haut Commissariat des Nations Unies (HCR), M. Rémy Mauvais était présent. Il a vu la nécessité de nous accompagner et de jouer sa partition à cette lutte ", a confié la directrice exécutive de l'ODELPA, Madame Soeurette Policar Montjoie. Après quelques mois, le HCR a emboité le pas. Dans le même élan, l'ODELPA a démarré avec 60 jeunes de Cité Soleil. Suite aux résultats de cette cohorte, le HCR a jugé bon de continuer a informé Madame Monjoie. Et de poursuivre : " Pour cette année, nous avons reçu 120 nouveaux jeunes de plusieurs quartiers de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, particulièrement ceux de Fort National et de Saint Martin. Ils ont été divisés en quatre groupes de 30 participants chacun. “ Déroulées dans les locaux de l'ODELPA, à Delmas, ces sessions de formation s'inscrivent dans le cadre d'une campagne de sensibilisation, d'éducation et d'appui psychologique. Les bénéficiaires de cette activité ont été formés pendant quatre jours sur diverses thématiques : l'entrepreneuriat, le VIH, la chimie cosmétique, les VBG et les techniques de communication sur les réseaux sociaux, l'élaboration de plan d'affaires et le micro crédit. Selon les explications de Madame Policar Montjoie, former les locataires de ces lieux sur les différents domaines suscités est un moyen visant à fortifier leur capacité face aux aléas de la vie. Quelle suite l'ODELPA donnera-t-elle à cette formation ? La la directrice de l'institution fuse : " Un concours axé sur les plans d'affaires a été aussi lancé suite au déroulement de ces assises . Les gagnant s de cette compétition partiront avec une enveloppe de 200 dollars US dans le but de démarrer ou de renforcer une activité génératrice de revenus. " Les bénéficiaires en parlent... Proposition formulée , initiative concrétisée. Nombreux ont été les participants à exprimer leur gratitude envers l'ODELA. " Cette session de formation était vraiment hors pair. Toutes les présentations me sont d'une grande utilité. La formation sur la chimie cosmétique a retenu mon attention. Après une telle séance, je me vois déjà comme une femme d'affaires. Je vais avoir des rentrées économiques, je vais retrouver mon autonomie et mon indépendance en tant que femme ", s'est réjouie Lovema Thimotée. De son côté, Joly Bedjilove, une autre participante, a fait savoir que, dans son quartier, les violences physiques et verbales sont toujours au quotidien. Une situation qui impacte grandement sa santé mentale. Suivre cet atelier de formation a été, pour cette jeune habitant de Delmas 24, bien plus qu'un apprentissage a été une thérapie. En effet, plusieurs facilitateurs et facilitatrices ont emprunté le costume d'un psychologue dans l'objectif de l'aider à traverser cette mauvaise passe. " Avant cette formation, les perceptions que j'avais vis-à-vis des femmes étaient très mauvaises. Je les considérais comme des êtres faibles. Je doutais toujours de leur capacité. Pour moi, elles étaient seulement bonnes à s'occuper des tâches ménagères. Travailler dans n'importe quel domaine était inconcevable. Mais maintenant après ces quatre jours de formation, je me suis rendue compte que je me suis trompé parce que les femmes sont des gens à part entière et ont les mêmes capacités que nous les hommes ", soutien Stanley Jean, un participant de la quatrième cohorte de formation. Originaire de Delmas 17, le jeune chanteur a fait savoir qu'il utilisera son micro pour sensibiliser pour éviter à ses pairs de commettre les mêmes erreurs que lui. Il pense que les réseaux sociaux sont les plateformes qui facilitent mieux les interactions et la transmission des messages et qu'il compte certainement les utiliser. Suite à ces témoignages venant de différents bénéficiaires, les responsables de l'ODELPA, avec l'appui de leurs partenaires, ne comptent pas baisser les bras. Leur souhait est de continuer à accompagner et de supporter plus de jeunes dans le pays. Esperancia Jean Noel esperanciajeannoel@gmail.com













