En Haïti, comme ailleurs, l'homophobie constitue l'un des obstacles majeurs à la riposte au VIH/sida. Il suffit d'un coup d'œil à l'Enquête sur la Mortalité, la Morbidité et l'Utilisation des services (EMMUS VI) pour se rendre compte de l'enjeu dont il s'agit. En effet, selon les données fournies par cette étude publiée en 2018, sur chaque 100 hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH), un peu moins de 13 (12,9%) sont VIH positif alors que la prévalence de l'infection au VIH est de 2% pour la population générale des 15 à 49 ans.
Discrimination et stigmatisation liées à l'orientation sexuelle
Les relations sexuelles entre personnes du même sexe sont perçues comme étant un péché par les groupes conservateurs. De plus, les homosexuels sont souvent victimes de sévices, d'harcèlement de tous genres que ce soit dans les rues, sur leurs lieux de travail ou dans les structures de soins. " Ces formes de discrimination et de stigmatisation liées à l'orientation sexuelle affectent non seulement la santé physique et mentale des HSH, mais aussi entravent la lutte nationale pour l'éradication du VIH/Sida en Haïti d'ici à 2030 ", indique la directrice exécutive de l'Organisation de développement et de lutte contre la pauvreté (ODELPA), Sœurette Policar Montjoie.
Malgré les efforts déployés par le Ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP) et ses partenaires, la prévention, le dépistage et la prise en charge du VIH voire l'adhérence au traitement dans la communauté des populations clés (notamment les HSH) restent difficiles.
Dissimulation
" Marginalisés, stigmatisés, discriminés à cause de leur orientation sexuelle ou identité de genre, les membres de la communauté HSH ont tendance à dissimuler leurs activités sexuelles, à s'isoler du reste de la population, à rester dans l'ombre au lieu de se rendre dans les centres de prise en charge ", regrette Mme Montjoie.
Par ailleurs, la directrice exécutive de ODELPA souligne que les HSH sont beaucoup plus à risque par rapport au VIH. Vulnérabilité due, entre autres, aux multiples partenaires sexuels, aux relations passagères et au faible taux d'utilisation des préservatifs. Aussi, fait-t-elle remarquer, nombreux sont les homosexuels qui développent ou entretiennent également des relations hétérosexuelles (avec des sujets de la population générale). Ce qui renforce la chaîne transmission du VIH au sein de la société haïtienne.
" La lutte nationale pour l'éradication du VIH/Sida doit aussi passer par la lutte contre la stigmatisation et la discrimination liées à l'orientation sexuelle ou encore contre l'homophobie. Nous devons accepter que la solution reste et demeure la tolérance envers la population LGBTI qui a le droit de choisir son orientation sexuelle ou de faire ce qu'elle veut de son corps ", martèle haut et fort Sœurette P. Montjoie.
Marie Juliane DAVID
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